Marchés pétroliers : Les craintes économiques face aux incertitudes sur l’offre

Les forces haussières sur le prix du pétrole, associées aux contraintes sur l’offre (Libye, Nigeria, EAU, Russie…) se confrontent aux forces baissières dues au ralentissement économique dans un contexte d’incertitude lié à la durée du confinement en Chine et à l’éventualité d’un embargo européen sur le pétrole russe.

Par Abdelkrim Salhi

 C’est ce que relève l’IFP Energies Nouvelles (Ifpen) dans son dernier tableau de bord sur les marchés pétroliers. L’institut de recherche français indique que Plusieurs pays membres de l’OPEP ont signalés des baisses de production. En proie à des tensions internes, la Libye a ainsi déclaré la semaine passée l’état de force majeure en raison de l’arrêt d’un deuxième terminal pétrolier, Brega (60 000 b/j), après celui de Zueitina situé à l’est du pays. En tenant compte de l’arrêt de certains gisements (El Feel), la réduction de l’offre est estimée à 0,6 million de barils par jour (Mb/j) soit plus de la moitié de la production du mois de mars (1,1 Mb/j). Le Nigeria, confronté à des attaques récurrentes sur ses installations pétrolières (pipelines en particulier), connait une baisse de production, qui est tombée début avril à 1,15 Mb/j contre 1,24 Mb/j en mars et 1,39 Mb/j en janvier (source NNPC) pour un quota OPEP+ de 1,7 Mb/j. Ce pays contribue, avec l’Angola (-0,5 Mb/j par rapport au quota), au déficit d’offre de l’OPEP qui s’élève à 1 Mb/j en mars par rapport aux objectifs de production. En ce qui concerne l’Irak, le ministre du pétrole a indiqué en début de mois que son pays était en mesure de renforcer ses exportations au-delà de 3,3 Mb/j, niveau d’exportation en mars, via les ports du sud du pays. Le niveau effectif dépendra toutefois des travaux en cours d’extension des capacités d’exportation. L’Irak fait en tout cas partie des pays qui respectent leur quota avec une production de pétrole de 4,29 Mb/j. La production des Etats-Unis, qui a connu une phase de stagnation, a augmenté de 0,3 Mb/j au cours de ces 30 derniers jours et pourrait croitre de 1 Mb/j sur un an, rythme de ces 12 derniers mois. Le Brésil a indiqué en début de mois pouvoir augmenter sa production de 10 % soit +0,3 Mb/j en 2022. – Certains analystes estiment que le Venezuela pourrait augmenter de 20 % son offre soit +0,15 Mb/j. « Le bilan pour ces pays reste insuffisant pour couvrir un éventuel embargo des exportations russes et demande de plus des délais. « Dans ce contexte, le rôle de l’Arabie saoudite pourrait être décisif alors que ce pays dispose de près de 2 Mb/j de marge disponible. Il convient de souligner que ce pays a déjà fait un effort important renforçant de près de 1 Mb/j sa production depuis mai 2021 » estime l’Ifpen. Dans ses dernières prévisions, Le FMI estime d que la croissance mondiale devrait ralentir, passant d’environ 6,1 % en 2021 à 3,6 % en 2022 et 2023. Cela représente respectivement 0,8 et 0,2 point de pourcentage de moins par rapport à ce qui était prévu en janvier. « Ces anticipations ont contribué à la baisse des marchés financiers entrainant celle du marché pétrolier » fait remarquer l’Ifpen, qui rappelle que l’AIE avait pris en compte, en mars, ce ralentissement, en ajustant de -0,9 Mb/j la demande de pétrole en 2022, dont 0,5 Mb/j lié à la croissance économique et 0,4 Mb/j en raison de la hausse du prix du pétrole (nouvelle révision en avril de -0,3 Mb/j).  « Les anticipations en termes de demande et d’offre sont assez différentes si l’on reprend les derniers rapports de l’AIE et de l’OPEP » constate, par ailleurs, l’institut de recherche français.  D’après l’OPEP, la croissance de la demande serait plus élevée en 2022 et l’offre des non OPEP serait plus soutenue. L’AIE anticipe au contraire une baisse importante liée à l’hypothèse d’un recul de 3 Mb/j de la production russe (-2,5 Mb/j pour les exportations) à partir du mois de mai. Sur ces bases, les conclusions sur le besoin de l’offre de l’Opep pour équilibrer le marché sont assez différentes : pour le deuxième trimestre, stagnation au niveau du mois de mars d’après l’OPEP, hausse de 1 Mb/j d’après l’AIE. L’écart offre/demande se situe donc entre 0 et 1 Mb/j au second trimestre ce qui semble gérable compte tenu des niveaux de déstockage prévus par les pays OCDE. « La pression devrait néanmoins perdurer sur le prix du pétrole compte tenu de l’usage nécessaire des stocks stratégiques et des limites en termes de capacités de production disponibles » estime l’Ifpen.

A.S.

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