
Le rapport alerte néanmoins sur une rapide augmentation de l’endettement. Entre 2010 et 2020, la dette publique de l’Algérie a bondi de 10,5% à 53,1% de son PIB. La pandémie, à laquelle s’ajoute la baisse importante des exportations d’hydrocarbures, a provoqué un choc pour l’économie algérienne en 2020 selon les Perspectives économiques en Afrique du Nord 2021 de la Banque africaine de développement.
Par Abdelkrim Salhi
La contraction de 4,6 % de la croissance du PIB réel du pays (comparé à un taux positif de 0,8 % en 2019) a été plus de quatre fois supérieure à la moyenne régionale. Cette forte baisse est due à l’effondrement des recettes d’exportation d’hydrocarbures, qui représentaient, en 2019, plus de 96 % des exportations de marchandises. En conséquence, l’Algérie a accumulé d’importants déficits budgétaires et de la balance courante. Le déficit budgétaire a plus que doublé, passant de -5,6 % du PIB en 2019 à -12,6 % en 2020 selon les estimations. Le solde du compte courant (dons compris) est passé de -10 % du PIB à -14,8 %. Le financement de ces déficits a accentué les vulnérabilités extérieures du pays. L’année dernière, l’Algérie a pris des mesures pour maîtriser les effets budgétaires négatifs de la crise. « La loi de finances complémentaire, publiée en juin 2020, visait à stimuler les investissements directs étrangers » rappelle le rapport. Les pouvoirs publics ont également annoncé des réformes structurelles visant à se départir de la dépendance à l’égard des produits de base (un modèle économique axé sur la rente) pour s’orienter vers une économie diversifiée et autonome qui devrait attirer les investisseurs étrangers). À la faveur de la remontée des prix du pétrole et de la demande, « la croissance économique de l’Algérie devrait repartir à la hausse pour atteindre 3,9 % en 2021 et 4,3 % en 2022 » prévoit la BAD. Le principal moteur de la croissance économique sera la reprise marquée des dépenses d’investissement et de la production et des exportations d’hydrocarbures. En 2020, les services représentaient 47,4 % du produit intérieur brut (PIB) en Algérie. Selon la BAD, Le gouvernement a alloué 70 milliards de dinars (545 millions de dollars) pour atténuer les incidences sanitaires et économiques de la COVID. Au nombre de ces mesures figurent le report du paiement des impôts, l’octroi d’allocations et de transferts en espèces aux ménages vulnérables, la réduction du taux de réserves obligatoires à 6 %, l’abaissement du taux directeur principal de 0,25 point de pourcentage à 3 % et la réduction des importations d’au moins 10 milliards de dollars. « En 2020, les envois de fonds vers l’Afrique du Nord ont enregistré la plus forte baisse en Algérie, de 104 millions d’USD (soit une baisse de 5,8 % par rapport à 2019) » rapporte la BAD. Dans toute la région, la dette publique a augmenté rapidement entre 2010 et 2020 – en particulier en Algérie, où la dette publique en pourcentage du PIB a plus que quintuplé. Entre 2010 et 2020, la dette publique de l’Algérie a bondi de 10,5% à 53,1% de son PIB. « Étant donné que les autorités ont décidé de ne pas emprunter à l’extérieur, la dette publique de l’Algérie est essentiellement intérieure » souligne la BAD. Au cours de la période 2010-2019, elle a fortement augmenté pour financer un déficit dû à la hausse des dépenses et à la chute des prix des hydrocarbures. Fin 2019, la dette publique extérieure représentait moins de 2 % du PIB, mais la dette intérieure, garanties comprises, atteignait 44 %. La dette publique intérieure de l’Algérie se compose principalement de titres du Trésor et de dettes restructurées contractées auprès d’entreprises publiques. L’un des avantages d’une dette essentiellement intérieure réside dans le fait qu’une baisse des recettes d’exportation entraine des pressions moins importantes sur le taux de change et le risque d’épuisement des réserves internationales, ce qui permet au pays de continuer à emprunter sans s’inquiéter outre mesure de la capacité du service de la dette extérieure. D’autre part, dans de nombreuses économies en développement, les pressions inflationnistes pourraient déboucher sur une répression financière qui aurait des conséquences néfastes sur les inégalités et la croissance. Étant donné qu’un soutien à court terme s’avère nécessaire pour lutter contre la pandémie, il est fort probable que la poursuite de la monétisation du budget engendre des pressions inflationnistes plus fortes, des déficits plus importants de la balance courante (qui exerceront une pression sur les réserves de change et le taux de change) et une forte augmentation du ratio de la dette intérieure par rapport au PIB. Si les dépenses d’urgence peuvent justifier la poursuite de cette politique pendant un an ou deux, un seigneuriage dépassant 2 à 3 % du PIB commencera à provoquer des pressions inflationnistes. La forte baisse de l’activité économique due à la pandémie atténue probablement ces pressions pour l’instant. L’économie en partie régulée a peut-être aussi réduit l’inflation. Sur le plan extérieur, pour contrôler le creusement du déficit de la balance courante, le gouvernement a imposé un contrôle des importations. Cette mesure peut être efficace à court terme, mais elle entraînera d’importantes distorsions économiques à plus long terme. Pour l’instant, l’effet le plus important a été une forte augmentation de la dette publique brute. Dans la plupart des autres économies d’Afrique du Nord, cette dette devrait se stabiliser après le bond provoqué par la COVID en 2020. « Toutefois, le ratio d’endettement de l’Algérie devrait plus que doubler entre 2020 et 25 pour dépasser 100 % du PIB » indique la BAD.
A.S.
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