Une enquête réalisée par l’Office national des statistiques (ONS) sur les dépenses de consommation des ménages montre des disparités notables entre les différentes catégories de population. L’enquête « légère » sur les dépenses de consommation des ménages a été réalisée en 2022 sur un échantillon représentatif de 3500 ménages algériens ordinaires, précise l’ONS.
Par Abdelkrim Salhi
La collecte a duré 2 mois sur le terrain et a concerné plus de 350 produits alimentaires et non alimentaires. L’enquête révèle que les dépenses de consommation des ménages algériens pour l’année 2022 étaient de l’ordre de 8 016 Milliards de DA soit une dépense moyenne de 72 500 DA par ménage et par mois. « La dépense globale des ménages algériens a été estimée à 8 016 Milliards de DA en 2022 contre 4 489,5 Milliards de DA en 2011 », lit-on dans le document de l’ONS. Elle a presque doublé durant la décennie au niveau national, enregistrant un coefficient multiplicateur de 1,8. Par ménage, la dépense annuelle moyenne est de 870 279 DA en 2022 contre 716 591 DA en 2011, soit une augmentation de 21,4% tandis que la dépense individuelle annuelle passe de 122 274 DA à 175 461 DA en 2022, avec une augmentation plus élevée égale à 43,5%. L’alimentation et les boissons constituent le poste de dépenses le plus important pour les ménages algériens, représentant 34% du total des dépenses directement suivies par le poste « logement et charges » qui enregistre une part égale à 29%. Les dépenses consacrées aux « transports et communications » occupent la troisième position avec une part égale à 11,4%. Le poste « santé et hygiène corporelle » représente 8,2% du total des dépenses, alors que le poste « Education, culture et loisir » représente seulement 4,6%. L’ONS fait état de des changements significatifs dans les habitudes de dépenses des ménages algériens entre 2011 et 2022. La part de la dépense alimentaire dans le budget des ménages algériens a considérablement baissé durant cette période et enregistre un écart de 7,5 points tandis que celle des dépenses liées au « logements & charges » a considérablement augmenté (+8,6 points). Ceci pourrait être le résultat de la souscription de différents ménages aux programmes de logement (AADL, LPP, etc…). À part des dépenses pour le « transport & communications » reste relativement stable, avec une légère baisse et lui permet de garder la troisième place. Une augmentation significative des dépenses en santé et hygiène corporelle (+3,4 points) montre une tendance accrue à investir dans la santé, peut-être en raison d’une sensibilisation accrue en raison de la pandémie passée (COVID 19).
Des disparités notables entre les différentes catégories de population
La répartition des dépenses selon les déciles de population montre des disparités notables entre les différentes catégories de population. L’ONS explique que « la construction de déciles de population en utilisant la dépense annuelle moyenne par tête permet d’avoir une meilleure appréciation des disparités dans la dépense de consommation des ménages entre les différentes catégories de population ». Les déciles de population, souligne-t-on, « sont définis comme étant des groupes de 10% de population classés par ordre croissant selon la dépense annuelle moyenne par tête. Le premier décile correspond aux 10% de la population dont la dépense annuelle moyenne par tête est la plus faible (population la plus défavorisée). Le deuxième décile correspond aux 10% de la population dont la dépense annuelle moyenne par tête est immédiatement supérieure à celle du premier décile et ainsi de suite jusqu’au dixième décile qui correspond aux 10% de la population dont la dépense annuelle moyenne par tête est la plus élevée (population la plus aisée) ». L’enquête révèle que les ménages du premier décile dépensent 3% du total des dépenses tandis que cette part est dix fois plus importante dans le dernier décile. De plus, les 30% de la population aisée s’accaparent plus de 55% des dépenses alors que les 3 premiers déciles n’en consomment que 13%. Entre 2011 et 2022, tous les déciles ont vu leurs dépenses augmenter, avec une hausse plus marquée pour les ménages du décile supérieur (Décile 10), dont la dépense passe de 1 167,2 milliards de DA en 2011 à 2 414,2 milliards de DA en 2022. Néanmoins, la part de chaque décile dans la dépense nationale a connu une baisse hormis le dernier décile dont la part passe de 26% en 2011 à plus de 30% en 2022. Les groupes « alimentation & boissons » et « logement & charges » représentent les postes de dépenses les plus importants pour tous les ménages ; leur part atteint +70% dans le premier décile et représente +54% dans le dernier. Cette tendance à la baisse se fait au profit d’autres groupes de produits à mesure que le niveau de vie augmente. En effet, les «Transport & communications » ainsi que les groupes « produits divers et autres dépenses » et « meubles & articles ménagers » voient une augmentation significative dans les déciles supérieurs, indiquant des dépenses accrues dans ces domaines pour les ménages plus aisés. Les autres postes de consommation montrent une certaine variabilité mais restent relativement stables.
Dépense annuelle moyenne par ménage et par tête
La dépense annuelle moyenne par ménage est passée de 716 591 DA en 2011 à 870 279 DA en 2022, enregistrant une augmentation de 21,4% durant la période, fait savoir l’ONS. « La «dépense annuelle moyenne par ménage» donne une idée du budget global d’un ménage, tandis que la «dépense annuelle moyenne par tête» affine cette évaluation en tenant compte de la taille du ménage, offrant ainsi une perspective plus précise du niveau de vie individuel », fait remarquer l’Office des statistiques. « Ces deux indicateurs permettent de mieux comprendre la répartition des ressources au sein d’une population, apprécier leur niveau de vie et identifier les inégalités potentielles », ajoute-t-il. Evoquant les dépenses annuelles moyennes par ménage selon les déciles, l’enquête constate qu’en 2011, les dépenses variaient considérablement entre les déciles, allant de 324 300 DA pour le décile 1 (les 10% les plus pauvres) à 1 488 990 DA pour le décile 10 (les 10% les plus aisés). En 2022, ces écarts se creusent encore plus, avec des dépenses allant de 369 647 DA pour le décile 1 à 1 865 758 DA pour le décile 10. Les évolutions les plus notables pendant la période sont relevées au niveau des 8ème et 10ème déciles qui connaissent les plus fortes hausses de dépenses (+25%) tandis que le taux de croissance le plus faible est observé dans le décile 4 (+10,4%). La répartition des dépenses annuelles moyennes par ménage selon les groupes de produits a évolué de manière significative entre 2011 et 2022. La stabilité des dépenses alimentaires suggère une priorité continue pour les biens de première nécessité. Certaines catégories, comme la santé, l’éducation et le logement, ont vu leurs dépenses augmenter considérablement (enregistrant des taux de croissance de +108,7%, +75,6% et +72,6% respectivement), tandis que d’autres, comme l’habillement, ont connu une baisse notable (-36,3%). En 2011, la dépense moyenne annuelle par tête était de 122 274 DA. En 2022, cette dépense a augmenté à 175 461 DA enregistrant une croissance de 43,5% sur la période. Cette évolution est nettement supérieure à celle de la dépense annuelle moyenne par ménage (21,4%). « Cela pourrait s’expliquer par une diminution de la taille des ménages ou une augmentation des dépenses individuelles », estime l’ONS. Malgré une augmentation des dépenses moyennes par tête entre 2011 et 2022 en valeurs absolues pour tous les déciles, les rapports de la dépense des déciles 1 à 9 par rapport à la moyenne nationale diminuent. En revanche, le décile le plus aisé enregistre non seulement une augmentation significative de ses dépenses, mais voit également son rapport par rapport à la moyenne globale croître, passant de 259,9% à 299,4%. Les coefficients multiplicateurs varient de 1,26 (décile 1) à 1,38 (déciles 7 à 9), ce qui montre une croissance modérée des dépenses dans ces groupes, contrairement au décile 10, dont le coefficient multiplicateur de 1,65 est le plus élevé, reflétant un accroissement plus rapide des dépenses dans cette tranche de la population. Toutes les dépenses des différents groupes de produits ont augmenté sur la période, hormis les groupes « habillement & chaussures » et « meubles et articles ménagers » qui ont connu une diminution. La répartition de la dépense annuelle moyenne par tête selon les groupes de produits montre une réallocation des dépenses des ménages, entre 2011 et 2022. Cette réallocation reflète les changements dans les besoins et les préférences des ménages au fil du temps et souligne les inégalités dans la manière dont les dépenses ont évolué, certaines catégories voyant des augmentations bien plus marquées que d’autres. En effet, les dépenses en alimentation enregistrent l’augmentation la plus faible avec un taux de croissance de +18% tandis qu’une priorité accrue pour la santé (+146,6%), l’éducation & loisirs (+107,5%) et le logement (+103,9), est enregistrée.
A.S.
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